Depuis bientôt un an, les plus hautes autorités de l'Etat s'acharnent
à dresser les citoyens les uns contre les autres. Elles ont
successivement jeté à la vindicte publique les Roms et les gens du
voyage, les Français d'origine étrangère, les habitants des quartiers
populaires, les chômeurs et précaires qualifiés d'«assistés»... Elles
ont ressorti le vieux mensonge d'une immigration délinquante, elles
pratiquent la politique de la peur et de la stigmatisation.
Nous avons manifesté le 4 septembre 2010, dans toute la France,
contre ce dévoiement de la République. Aujourd'hui, chacun mesure la
terrible responsabilité de ceux qui ont donné un label de respectabilité
aux idées d'extrême droite, à la xénophobie, à la haine et au rejet de
l'autre.
De dérapages verbaux en pseudo-débats, de crispations
identitaires en reculs sociaux, la voie a été grande ouverte à une crise
démocratique encore plus grave que celle du 21 avril 2002.
Parce que nous sommes attachés aux valeurs de liberté, d'égalité et
de fraternité, nous ne supportons plus que la République soit ainsi
défigurée, la laïcité instrumentalisée au service de la stigmatisation
de millions de nos concitoyens, la xénophobie banalisée dans les propos
de ministres et de députés qui prétendent parler en notre nom à tous.
Nous refusons que la peur soit utilisée pour faire reculer nos libertés,
que les inégalités soient encouragées par l'injustice fiscale, le recul
des droits sociaux et la démolition des services publics.
Nous refusons cette République défigurée; celle que nous voulons,
c'est la République «laïque, démocratique et sociale» que proclame notre
Constitution; celle du 14 juillet 1789, du Rassemblement populaire de
1936, celle enfin du Conseil national de la Résistance. Celle qui
s'attache inlassablement à garantir à tous l'égalité en dignité et en
droits, l'égale liberté, l'égal respect de la part de ceux qui les
gouvernent.
C'est pourquoi nous lançons un appel solennel au rassemblement de
toutes et tous, à la mobilisation des consciences pour le retour de
cette République que nous voulons plus que jamais libre, égale et
fraternelle.
Deux cent vingt deuxième anniversaire de la prise de la Bastille, ce
14 juillet est le dernier avant l'échéance présidentielle de 2012.
Sachons nous en saisir, nous rassembler pour fêter la République de la
meilleure manière qui soit: en appelant nos concitoyennes et concitoyens
à faire respecter ses valeurs, aujourd'hui et demain.
Discours à la Bastille, le 14 juillet 2011, à l'occasion de la célébration de la fête nationale française
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