par Henri Mora
Il
se passe des choses très surprenantes du côté des défenseurs du projet
de Center Parcs de Roybon (Isère).
Soutenus par le Medef, la CCI, et par
les chefs d’entreprise en général, pour qui la marchandisation,
l’exploitation des ouvriers et des employés et le développement à tout prix sont essentiels à leur monde, les défenseurs du projet comptent à présent parmi eux le syndicat CFDT, qui a signé un communiqué proposé par le Medef.
Bien
que certains veuillent le faire passer pour un projet d’utilité
publique, il s’agit bien d’un projet visant à implanter sur une zone
humide en pleine forêt, une zone commerciale avec ses 2300 places de
parkings pour des clients venant consommer un décor et des prestations à
l’intérieur d’un camp de vacances entièrement clôturé.
Jamais
aucune société n’avait pu bénéficier d’autant d’égards de la part de ses
confrères et des autres professions. Jamais aucun élu n’était allé
aussi loin dans le soutien à un projet porté par une société privée.
Le
Conseil général a consacré 4 pages dans son mensuel Isère magazine
tiré à 490.000 exemplaires et distribué dans toutes les boîtes aux
lettres du département où il dit répondre aux arguments des opposants d'une
curieuse manière : les rédacteurs aux ordres se résument en 8 points qui ne sont bien
évidemment pas développés. C’est probablement cette forme de démocratie
que les ministres, parlementaires, conseillers généraux et autres élus de
gauche, de droite [ndlr : et d'extrême-droite] confondus, défendent avec entrain dans leurs communiqués de presse en faveur de la réalisation du Center Parcs
Isère…
Le
Conseil général est même allé jusqu’à réaliser des banderoles de
soutien – « Bienvenue à Center Parcs au Center Parcs » – qu’il propose
aux communes des Chambarans et que nous voyons fleurir à l’entrée
des villages… Il paraissait impensable jusqu'à aujourd’hui de
voir des communes faire la publicité d'une entreprise
particulière.
Mais le plus inquiétant dans cette affaire, c’est la manière dont les élus ont attisé les tensions à coup de propos haineux.
Déjà le 29 juin 2012, André Vallini, alors président du Conseil général
de l’Isère, menaçait à la tribune les opposants, lors du rassemblement
des défenseurs du projet dans le stade de Roybon : « moi, j’ai dit
souvent aux écologistes, pour ne pas les nommer – à ceux qui s’opposent
en tout cas à Center Parcs – je ne voudrais pas pour eux qu’ils aient
toujours à s’expliquer devant le peuple si Center Parcs venait à échouer
parce qu’il aurait trop de familles déçues, de gens qui attendent un
emploi »… Le ton était donné.
Depuis
on a pu entendre son successeur, monsieur Cottalorda dénoncer « les
extérieurs qui décident pour un territoire qu’il n’habite pas ». Ces
relents haineux et xénophobes sont repris par l’organisateur des manifestations des défenseurs du projet – le président de l’association Vivre en Chambaran :
Christian Lucciani – s’en prenant aux occupants comme à des « gens qui sont sur
notre territoire, qui ne sont pas chez eux et qui viennent bloquer les
projets sans même les connaître ».
Le plus haineux d’entre eux étant Monsieur
Serge Perraud, maire de Roybon, qui devant la caméra de BFM-TV tient, en
parlant des occupants de la MaquiZad, les propos suivants : « il est
bien temps que le gouvernement prenne ses dispositions pour chasser de
notre territoire ces terroristes ».
L’inflation
verbale du Medef, des élus et des responsables d’association exhale
des relents peu reluisants. Nous retournons les propos de Vallini
contre ceux qui ont choisi la haine et la xénophobie pour continuer à
soutenir ce monde que nous dénonçons : ceux qui défendent le projet de
Center Parcs en dressant une partie de la population contre les
opposants devront répondre des éventuels dérapages et de leur façon de
souffler sur les braises.
Ce conflit oppose deux manières d’aborder la situation actuelle.
Ce conflit oppose deux manières d’aborder la situation actuelle.
La première cherche irrémédiablement dans l’urgence, à sauver de l’effondrement un système économique insoutenable, dévastateur non seulement
d’un point de vue environnemental, social et humain, mais
paradoxalement aussi d’un point de vue économique comme le démontre
notre crise actuelle.
La seconde espère pouvoir sortir de cette obsession du développement à
tout prix et élaborer de nouveaux rapports humains et sociaux.
Henri Mora, 17.12.2014